La conference de cancun
Institut Français des Relations Internationales
Pour une relance du cycle du développement : refonder le consensus multilatéral après Cancun
Par Jean-Marie Paugam chercheur à l’IFRI
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Résumé
Le programme de développement de Doha conjuguait trois demandes divergentes des membres de l’OMC : les pays en développement voulaient rééquilibrer en leur faveur les accords existants ; les Etats-Unis voulaient un nouveau cycle de libéralisation ; l’Europe le voulait aussi mais en l’équilibrant par un enrichissement des règles économiques mondiales sur les « sujets de Singapour ».
Cancun a fait éclater ces ambiguïtés et l’échec de la conférence pourrait engendrer une panne durable de l’OMC. Cette dernière doit affronter deux grands défis.
Un défi systémique est lié aux limites de la « méthode de fabrication » du consensus international, que l’OMC avait de facto héritée du GATT. L’approche mercantiliste de la négociation a échoué à équilibrer enjeux de libéralisation et de régulation. Le
«consensus censitaire » qui privilégiait le pouvoir des grandes puissances commerciales affronte les rapports de force nouveaux créés par des stratégies d’alliance inattendues.
La « diplomatie non-gouvernementale » s’est professionnalisée - de Johannesburg à Cancun - et occupe les vides laissés par l’assistance du Nord au commerce des pays les plus pauvres.
Un défi stratégique est lié au doute sur la pertinence même de la libéralisation multilatérale comme paradigme de croissance. A Cancun, la géographie des peurs opposait : l’agriculture du Nord à la paysannerie du sud ; les industries du sud au géant chinois ; la doctrine libre-échangiste des institutions multilatérales aux attentes concrètes des pays en développement sur le terrain de l’aide.
Ce doute est profond et, au-delà de Cancun, pourrait se figer dans une préférence collective pour le statu quo actuel à l’OMC.
Ce statu quo serait porteur de menaces. Une multiplication des contentieux