La conscience de soi est-elle une connaissance?
Toutefois, dans quelle mesure la conscience de soi est-elle une connaissance de soi? La possibilité d'une telle connaissance supposerait une stabilité, une permanence de mon être. Or, je fais l'expérience d'un changement continuel en moi-même. A chaque instant, j'ai affaire à une pensée différente. La conscience est aussi bien le moyen d'éprouver que je ne demeure pas absolument le même. Autrement dit, il y a une altérité au cœur même du sujet: "Je est un autre" (Rimbaud). Cette altérité, cette altération n'est-elle pas de nature à compromettre la connaissance que je peux avoir de moi-même? Que signifie "moi-même"? Est-on jamais soi-même? Cela supposerait une coïncidence à soi qui n'est peut-être jamais donnée. Du seul fait que j'ai conscience de moi-même, est-ce que ce "moi-même" ne s'en trouve pas modifié? Dès lors, puis-je me connaître? Suis-je ce que j'ai conscience d'être?
I. L'expérience de la conscience
1. Le vrai moi est intérieur
Que suis-je? Qu'est-ce qui fait mon identité? On pourra être tenté de répondre que c'est mon apparence physique, en particulier mon visage. Cela est personnel. Seulement, mes traits changent avec le temps, au point qu'un ami perdu de vue aura du mal à me reconnaître après une longue absence. "Celui qui aime quelqu'un à cause de sa beauté, l'aime-t-il? Non; car la petite vérole, qui tuera la beauté sans tuer la personne, fera qu'il ne l'aimera plus" (Pascal, Pensées, 323 Br.). La "personne" ne se réduit donc pas à l'apparence physique. Si l'on m'aime pour ma beauté,