Bergson déclare dans un premier temps que la « conscience signifie d’abord mémoire ». Sans conscience, point de mémoire. Sans mémoire, peu de conscience : « […] mais la mémoire est là, ou bien alors la conscience n’y est pas. Une conscience qui ne conserverait rien de son passé, qui s’oublierait sans cesse elle-même, périrait et renaîtrait à chaque instant : comment définir autrement l’inconscience ? » Avec la conscience, le passé s’accumule et se conserve, le tout pour tendre vers l’avenir. Avec la mémoire, l’homme peut s’engager dans l’existence, avec le souvenir de ce qui a été pour se diriger vers ce qui sera. Le passé et le futur sont d’ailleurs pour Bergson les seuls temps qui orientent la conscience et lui permet ainsi d’être : « Sur ce passé nous sommes appuyés, sur cet avenir nous sommes penchés ; s’appuyer et se pencher ainsi est le propre d’un être conscient. Disons donc, si vous voulez, que la conscience est un trait d’union entre ce qui a été et ce qui sera, un pont jeté entre le passé et l’avenir. » Avec cette idée, on comprend que le présent n’existe pas dans le sens où il est imperceptible. Le présent est une eau qui coule, insaisissable, ou alors, comme le dit Bergson, le présent est une construction théorique qui certes participe de la conscience, mais cela uniquement pour limiter les deux axes temporels, le passé et l‘avenir, qui animent tout être conscient.
Une fois déterminée une fonction de la conscience, « retenir ce qui n’est déjà plus, anticiper sur ce qui n’est pas encore », Bergson s’interroge sur le pourquoi de la conscience. Qu’est-ce qui fait que des êtres soient conscients ? Il écarte d’entrée toute association entre le cerveau et la conscience qui voudrait que le premier justifie la seconde : « De même, la conscience est incontestablement liée au cerveau chez l’homme : mais il ne suit pas de là qu’un cerveau soit indispensable à la conscience. » Pour Bergson, la conscience, quelque soit son degré, son intensité, n’exige pas