La foi dans l'aventure ambigue
1058 mots
5 pages
Ce n’est guère que très récemment que L’Aventure ambiguë (Collection 10/18, Paris : Julliard 1974) a commencé à faire l’objet d’une critique littéraire propre à éclaircir ses subtilités [1]. Auparavant, ce roman avait surtout été étudié dans l’optique de sa place historique dans la tradition romanesque africaine [2], et de sa position vis-à-vis du thème de la négritude [3]. Sa définition comme roman philosophique [4] a aussi peut-être empêché une bonne perception de ses implications politiques. La plupart des critiques [5] ont suggéré que la mort du personnage principal, Samba Diallo, était une sorte de suicide. Ils y ont vu une conclusion à juste titre ambiguë au roman, à l’aventure ambiguë d’un héros qui semble, à sa mort, avoir échoué dans sa quête [6] d’une solution au dilemme de son peuple, au dilemme des Diallobé, mais qui, pourtant, trouve une certaine joie spirituelle dans la mort. Il ne fait aucun doute que l’ambiguïté est un élément crucial de L’Aventure ambiguë, mais elle ne recèle pourtant pas toutes les clés de la structure dialectique du roman et de la perception que Samba Diallo a de l’aliénation de sa foi et des buts originels de sa vie [7].
Comme cette étude du roman et des problèmes qu’il pose va tenter de le montrer, la vision politique de l’auteur n’est ni ambiguë ni négligeable en dépit de l’importance donnée à l’itinéraire psychologique et philosophique du personnage principal [8]. En fait, la vision politique de Kane est clairement implicite de par la nature des problèmes philosophiques qu’il soulève. Le livre nous présente un héros exemplaire, gagnant la sympathie et l’admiration du lecteur par sa rigueur et son honnêteté intellectuelles et par la résistance morale dont il fait preuve face à des questions angoissantes. Il découvre qu’il n’existe pas de solutions évidentes toutes prêtes à ces questions. Il semble que le temps seul pourra mettre un terme à ses souffrances puisque le temps seul peut offrir des circonstances et la sagesse