La liberté
Descartes affirme que l’expérience de la volonté me fait découvrir ce qu’était la liberté. Or Spinoza fait remarquer, précisément, qu’on fait aussi l’expérience de notre absence de volonté, et en ce sens de notre absence de liberté. Souvent les hommes “ voient le meilleur et font le pire; ils se croient libres cependant ” - dit Spinoza. A quoi tient alors cette défaillance de notre volonté ? A l’ignorance de ce qui nous amène à faire le pire, quand on voit le meilleur. Descartes disait qu’on était d’autant plus libre qu’on savait ce qu’on devait vouloir. Mais ne peut-on pas vouloir le mal, tout en voyant ce qui est bien ? Si on distingue, comme le fait Descartes, la volonté (la faculté de choisir) de l’entendement (de la faculté de connaître ce qui est vrai ou faux, bon ou mal), alors on peut très bien concevoir, dans l’absolu, qu’on puisse savoir ce qui est vrai ou bon, tout en choisissant d’affirmer ce qui est faux ou de faire ce qui est mal “ Il nous est toujours permis de nous empêcher de poursuivre un bien qui nous est clairement connu, ou d’admettre une vérité évidente, pourvu seulement que nous pensions que c’est un bien de témoigner par là notre libre arbitre ”. (Lettre au Père Mesland, de février 1645)
Spinoza nie que la volonté puisse être libre, puisse ne pas être déterminée par une cause (autre que l’affirmation d’elle-même). Mais nous ne connaissons pas nécessairement ce qui nous détermine à vouloir ceci plutôt que cela. Si je fais le pire, tout en voyant le meilleur, c’est que je ne parviens pas à maîtriser mes désirs, pour des raisons que j’ignore. Pensons au joueur ou au drogué qui sait qu’il ne doit pas se remettre à jouer ou à boire, mais qui ne peut aller contre son désir... La passion consiste précisément à subir des désirs comme on subit une