La mort des amants
121ème sonnet de l’édition de 1861 des Fleurs du mal est le 1er poème de la section La Mort qui clôt le recueil. Or ce sonnet , dont on ignore la date de composition reçut un accueil très favorable. A la fin du XIX ème siècle nombreux furent les auteurs que Baudelaire influença , romanciers et musiciens ! Ce sonnet est régulier en décasyllabes.
La thématique et les images produisent en revanche un effet de surprise et une impression d’étrangeté. Alors que l’on s’attendrait à une vision tragique et pénible, l’évocation de la mort est au contraire joyeuse et sereine. On est très loin ici des visions atroces d’ »UN voyage à Cythère » et d’une « Charogne » . L’atmosphère de ce sonnet n’est pas en revanche sans rappeler « L’invitation au voyage » comme si la mort était un au-delà où « Tout n’est qu’ordre et beauté, luxe , calme et volupté ». De plus, Baudelaire a été ici influencé par les théories platoniciennes qui éclorent au XVème siècle en Italie, proposant une vision inédite des rapports de l’homme et du monde. Comment le poète parvient-il donc, en utilisant des repères culturels du passé, à franchir le cap de la modernité ?
I- Une vision heureuse et paradoxale de la mort
Nous avons une représentation étrange de la mort remarquée par un réseau de qualificatifs surprenants. Le 1er étonnement vient du fait que la mort n’est jamais nommée dans le poème. Elle n’est pas non plus présente sous la forme de personnification. Sans le titre, ce poème pourrait passer pour une évocation béate de l’amour . Or cette évocation donne lieu à une peinture très précise. Sur 14 vers on compte plus de 20 adjectifs. 3 appartiennent au champ lexical de la mort « dernières, ternis, mortes », ce qui est rare. Les autres font référence à la vie. Ainsi, grâce à « pleins, profonds, chargé », naît une impression de plénitude ! On est ici à mille lieues des qualificatifs habituels qui font de la mort le symbole du vide et de l’absence. De plus, les