La mort (Drelincourt)
D’où procèdent les frayeurs de la mort omme un sage et prudent médecin examine soigneusement les causes de la maladie avant que d’ordonner le remède, et qu’un chirurgien expert sonde la plaie avant que d’y verser du baume, j’estime qu’il est fort à propos de rechercher par le menu d’où procèdent les frayeurs de la mort avant que d’entrer dans le détail des consolations que nous espérons de donner à l’âme fidèle. Car ayant reconnu les causes et la source du mal, il nous sera fort aisé d’y apporter des remèdes convenables. Après que nous aurons sondé et lavé la plaie, nous y verserons, avec l’assistance de Dieu, le vrai baume de Galaad.
Premièrement, nous ne pensons pas assez souvent à la mort, et ne méditons pas comme il faut sur la misère et la fragilité de notre pauvre et chétive nature. Nous confessons de bouche que notre vie n’est qu’un souffle en nos narines, une vapeur qui disparaît, et une ombre qui s’envole, mais nous nous flattons dans le secret de notre cœur, et nous prenons plaisir avec
Hérode que l’on nous croie de petits dieux. Parce que la mort vient à nous avec des pieds de laine et sans bruit, nous nous imaginons follement qu’elle ne viendra point du tout, comme ce méchant serviteur, dont il est parlé en l’Evangile, qui de ce que son maître tarde à venir, conclut qu’il ne viendra jamais. Nous nous laissons piper par les suggestions flatteuses de notre malheureuse chair, et par les artifices trompeurs du serpent ancien qui nous siffle, comme à nos premiers parents: Vous ne mourrez nullement.
II. Nous disons tous que la mort est inexorable, et qu’elle n’a point d’oreilles ; cependant, nous vivons, pour la plupart, comme si nous avions traité accord avec la mort, et que nous eussions intelligence avec le sépulcre. Comme si nous étions bien assurés que la mort est encore loin, et qu’elle ne viendra de longtemps. Nous fiant sur notre