La notion de « guerre juste » à l’épreuve des exemples contemporains
Nader Barzin
« Existe-t-il une guerre juste ? » : ainsi s’intitulait le colloque organisé en octobre dernier à Paris, qui nous proposait de réfléchir sur ce thème. Bien que la question soit posée au présent, la plupart des réponses ont été formulées au passé. Plus que de la psychanalyse, c’est une question qui relève de la philosophie et de la morale. La notion de justice est parfois définie comme le fait de donner à chacun ce qui lui revient. Dans ce contexte, une conduite morale doit être partagée au sein d’une communauté culturelle, religieuse, civile, ou philosophique. Au sein de notre société, par exemple, il ne serait pas juste de couper la main d’un voleur. La tentation est grande de faire référence à des penseurs comme Saint Thomas d’Aquin, Jean Bodin ou bien Francisco Suárez, qui définissent en scolastique chrétienne les conditions de la guerre juste : autorisée par la foi et la raison, nécessaire, défensive et obéissant à des conditions éthiques. Mais les conditions de notre XXIe siècle sont bien différentes de celles du treizième ou seizième siècle. En effet, nous vivons dans une époque où une multitude de situations, mentalités et de croyances coexistent, qui reflètent pour certaines des caractéristiques bien anachroniques. La tentation existe aussi, de passer en revue, comme l’a réalisé de façon impressionnante Kenneth Waltz1, les théories autour du comportement humain, de la structure des États et du système international. Chacun de ces facteurs peut expliquer, au moins théoriquement, le « pourquoi » de la guerre, même si la question de « justesse » n’y trouve pas sa réponse. Par ailleurs, il risque d’y avoir un
1 Waltz, Kenneth, Man, the State, and War : a Theoretical Analysis. Columbia University Press, NY, 1954.
182
TOPIQUE
amalgame entre différents types de guerre qui ramènent les conclusions à des généralités. Le parti pris dans cet article est de traiter ce sujet