La nuit de décembre musset
Zubullah Abdul Karim
En 2072, lorsque le dernier saumon rose vint s’échouer sur les côtes du district 162 ( anciennement l`île de Vancouver), le chef-représentant Angora fit installer une immense estrade près du poisson et convoqua toute la presse pour souligner cet triste événement.
Tout le gratin écologique se retrouva près de l’océan: les environnementalistes, les biologistes, les récupérateurs de papier, les mangeurs de pois chiches, les adeptes du mouvement Vert Demain, les apôtres de l’Herbes Absolue, les disciples des Bibittes disparues. Il y avait même quelques sous-présidents, des personnalités connues dans le domaine artistique et des caméras de télévision à définition extrasensible.
Comme le saumon lui avait fait l’honneur de mourir dans son propre district, le chef-représentant Angora adressa un vibrant discours à ses concitoyens. Il déplora d’abord le triste fait qui laissait tout le monde dans un état de perplexité grandissante: il n’y avait plus de saumon rosse sur la terre. Avec la mort de ce spécimens, c’était toute une espèce qui disparaissait pour toujours.
Il énuméra ensuite toutes les espèces en voie d’extinction qui n’attendaient que le secours de l’homme pour survivre. Impressionné par les caméras qui tournaient autour de lui, il pensa tout à coup qu’on le verrait probablement aux Nouvelles de fin de soirée. Comme les élections du district approchaient, il profita de cette tribune pour accentuer son discours, y ajouter quelques éléments qui ne pouvaient pas nuire à son image. Il étaya son propos de quelques trémolos bien sentis en lâchant, comme on dit, le gros morceau:
-Nous sommes tous responsables de la mort des poissons. Nous sommes coupables et nous devrions subir les conséquences de notre inconscience. En tout cas ici, au district 162, les citoyens ne se déroberont pas à leurs responsabilités et agiront pour montrer à la face du monde qu’ils sont eux aussi coupables.
Ces mot furent