La pensée de la diglossie chez glissant
Le conflit diglossique conduit à ce que la critique a appelé une surconscience linguistique. Cette expression renvoie à un ressenti de la problématique des langues. Chez les écrivains issus d’une société vivant dans une situation diglossique, la surconscience linguistique vient de la douleur éprouvée face à cette situation.
1. Domination de la langue : une problématique à dépasser La situation diglossique suppose une relation hiérarchique entre les langues en présence. Il ne s’agit pas seulement d’une distribution inégale de ces langues dans la société : la situation diglossique peut conduire à une valorisation d’une langue par rapport à l’autre. Dans le cas de la Martinique, elle met en relation le créole avec le français. L’écrivain Patrick Chamoiseau, dans son texte à la fois autobiographique et théorique, Ecrire en pays dominé, déclare :
Je découvre, comme une vague qui dissipe son écume, cette opposition initiale en moi. Le désordre illisible du pays et l’ordre clarificateur de l’entreprise coloniale.
Chamoiseau met en avant le fait que la colonisation instaure un ordre. C’est de cet ordre que découle une hiérarchisation entre le français et le créole. Le français est considéré comme une langue supérieure dans le contexte colonial. Il s’impose comme langue officielle. Edouard Glissant tient un discours semblable à celui de Chamoiseau lorsqu’il affirme :
Il s’ouvre une nouvelle perspective pour l’Antillais que je suis, appartenant à un pays où il y a une langue dominante, la langue française, et une langue dominée, la langue créole.
La situation diglossique mise en avant par ces deux auteurs est articulée sur la relation asymétrique entre la langue créole et la langue officielle. C’est ainsi que le français hexagonal est perçu comme la norme et comme une langue de prestige vis-à-vis du créole. Louis-Jean Calvet, auteur de l’ouvrage Linguistique et colonialisme, petit traité de glottophagie, définit le phénomène de