La poesie engagée
L’écriture poétique vous paraît-elle apte à convaincre le lecteur, à susciter son engagement, ou pensez-vous comme Sartre qu’elle brouille le message ?
Le mot "poésie" vient du grec ποιεῖν (poiein) qui signifie «créer ». Le poète est donc un créateur, un inventeur de formes expressives. Mais comme l’écrivain ou plus généralement l’artiste il s’est souvent questionné sur le monde qui l’entourait, la société à laquelle il appartenait. Le poète, prenant conscience de ceux-ci, renonce à une position de simple spectateur et met alors sa pensée et son art au service de la cause qu’il défend. C’est la naissance de la poésie engagée. De Ronsard à Boris Vian, poète après poète, chacun mène son propre combat, selon la seule règle de sa conscience ; si bien que chacun, dans ce combat d’homme parmi les hommes, s’élève au plus haut de lui-même. C’est son devoir de poète engagé.
Mais la poésie limite-t-elle la transmission claire des idées ?
Sartre le désapprouve, mais la poésie, art du langage, première expression littéraire de l’humanité, utilisant le rythme comme aide à la mémorisation et à la transmission orale est néanmoins un bon moyen de convaincre et même de persuader les lecteurs.
Dans Qu’est-ce que la littérature, 1948, Sartre affirme que le langage poétique ne peut exprimer l’engagement de l’écrivain. Pour lui la poésie se résume à l’expression des sentiments. Elle brouille le message par sa construction et sa forme. Le poète se perd, trop absorbé par l’expression de ses sentiments.
C’est le cas du poète Pierre Emmanuel dans « Hymne de la liberté » issu du recueil Jour de colère écrit en 1942. Dans ce poème, le poète ne désigne pas clairement sa cible. On comprend par le chant lexical de la torture, des termes comme « prison » « enchaînés » « tyrans » et, par la date du recueil-1942- qu’il s’agit d’une dénonciation de l’occupation allemande, ce que confirme le texte de Jean Paul Sartre, qui mentionne Pierre Emmanuel parmi les «