La publicité et la mythologie
Au début, il y avait Henri Pourrat, notre génial inventeur de l'Auvergne, à la barbe patriarcale et fluviatile. Il est propitiatoire de lui emprunter un texte médité dans une de ces anciennes maisons des Combrailles ou de l'Ambertois où le temps semble arrêté et concentré dans la recherche d’une vie “à la fois plus vraie et plus légère”.
La scène débute par un de ces jours calmes de l'enfance : “Une vocation coloniale vint à l'amiral Gourbeyre, neveu des papetiers seigneurs de Nouara, d'un paravent souvent contemplé en ces années où les images font poésie dans la tête […] Avant le romantisme des thèmes littéraires, il y avait peut-être dans les châteaux tout un romantisme d'images” (Dans l’herbe des trois vallées).
Le pouvoir de vocation et de fascination qu'elles représentent pour Vialatte a récemment été étudié (1). Il est même possible de parler d'un petit culte pour les icônes publicitaires. Plus prosaïquement il convient d'en dresser l'inventaire.
Les divinités principales
La déesse suprême reste évidemment la grande négresse qui règne sur Les Fruits du Congo. Alexandre Vialatte semble avoir été particulièrement informé de la genèse de cette affiche :
“C'était là le laboratoire de la 2 C.A. dont l'algèbre signifiait “Conseils et Créations Artistiques”. C'était de là que sortaient les somnambules de cire qu'on voit surgir dans les vitrines, comme un peuple chloroformé.
Et c'était là aussi qu'était née la négresse – un jour de dépression de la nature – des besoins de la grande épicerie, de la complaisance d'un garçon de bar et de la beauté d'une étudiante en pharmacie. Un docteur russe fut son parrain, un journaliste du Cantal fut sa marraine. Elle naquit internationale, en pure enfant de cet arrondissement. Et sans doute M. Panado eut-il sa part de collaboration dans la chimie qui procéda à sa naissance. Ce fut au sein d'une grande mélancolie que la noire pharmacienne du boulevard Saint-Michel devint la dame plate, l'icône, la