La reproductibilité de l'oeuvre d'art
Les techniques de l’imprimerie et de la lithographie ont depuis longtemps supprimé le rapport direct entre le produit original de l’auteur -son manuscrit- et son public. Désormais, il en va de même pour la musique transmise aux amateurs par les médias. Les arts plastiques témoignent de la même évolution, avec la reproduction imprimé à grande échelle. En 1936, réfléchissant aux conséquences de la photographie, du cinéma et et des procédés de reproduction en série sur l’art, le philosophe Walter Benjamin estime que cette reproductibilité fait perdre à l’oeuvre son «aura», ce rayonnement presque sacré dont bénéficie une oeuvre d’art authentique. A sa place se développent des formes de consommation culturelle de masse. L’art est alors affecté jusque dans sa conception par les moyens de sa diffusion. Pour organiser notre réflexion, nous nous pencherons sur différentes oeuvres: une affiche de propagande nazie mettant en garde contre l’espionnage, une photographie prise dans l’atelier de Marcel Duchamp en 1918 présentant les Ombres portées du readymade, et enfin de Shadows, oeuvre d’Andy Warhol constituée de cent deux toiles sérigraphiées datant de 1978. A travers l’étude de ce corpus, une problématique émerge: la reproductibilité de l’oeuvre d’art la transforme t-elle en objet de consommation, et plus largement en objet utile ? Nous tenterons de répondre à cette question en analysant la dématérialisation de l’art, d’apparence irreproductible, en invoquant la notion d’ombre commune aux trois documents analysés. Puis nous verrons en quoi les notions d’utilitaire et de fonctionnel sont étroitement liées à la valeur d’exposition de l’oeuvre.
1/5
L’oeuvre d’art à toujours été reproductible, et cela bien avant la naissance de l’imprimerie; les Grecs utilisaient déjà la fonte et l’empreinte pour reproduire les pièces de monnaie. Puis il y aura la gravure sur bois, au burin et à l’eau-forte , et en 1798 ce