La question de la mémoire des héros de la résistance à la colonisation est très importante pour comprendre l'Afrique du XXIème siècle, ses questions identitaires et géopolitiques internes, ainsi que les rapports ambigus entretenus par élites et population avec l'ancienne puissance coloniale. Voici ci-dessous l'analyse qu'en fait le grandécrivain ivoirien Ahmadou Kourouma.
La mémoire de la résistance à la colonisation par Ahmadou Kourouma
(texte paru après la mort de l'auteur en 2003)
C'est en 1904 que les limites de la Côte-d'Ivoire sont précisées et que la colonie entre dans l'Afrique occidentale française. Mais les résistances des populations ivoiriennes de l'intérieur, toujours les mêmes Gouros, Baoulés et Attiés, sepoursuivront jusqu'en 1914 et même au-delà. Dans les années trente, les Gbantiés de Boundiali, les Attiés de Rubinot, les Dioulas de Bobo se révoltèrent contre la colonisation française. Mais ces résistances héroïques du peuple ivoirien ne sont pas reconnues par la Côted'Ivoire officielle. Houphouët, le premier président de la Côte-d'Ivoire, avait une conception curieuse de l'histoire des peuples. Pours'entendre avec le colonisateur, il a effacé la résistance à la colonisation. Il a parlé des vainqueurs et a oublié les vaincus. Il a laissé les vaincus dans l'ombre de l'oubli. C'est pourquoi aucune rue des villes ivoiriennes ne porte le nom des résistants ivoiriens à la colonisation. En revanche, elles affichent les noms des administrateurs coloniaux les plus cruels et racistes. La Côte-d'Ivoiremet entre parenthèses les souffrances et les actes héroïques des Ivoiriens pendant la pénétration et la conquête coloniale du pays. C'est pourquoi les Ivoiriens vont chercher leur appartenance à la patrie dans l'ivoirité. L'ivoirité, c'est être ivoirien avant d'autres. Ce n'est pas avoir versé son sang pour la patrie... Ahmadou Kourouma (2004) : Quand on refuse, on dit non, pp 58-59
Yveline Dévérin – Géopolitique de l'Afrique
INDÉPENDANCES
Tableau synthétique des indépendances. Le nom des personnalités ayant marqué la lutte pour l'indépendance est précisé en rouge. On remarquera le grand tournant à partir des années 1956, et le basculement de 1960. Les pays sont classés par ordre alphabétique de leur nom actuel (en 2011).
Pays Date de l'indépendance Puissance coloniale
Afrique du Sud
1910 : Obtient le statut de "dominion" britannique "Union Sud‐africaine" 1931 : statut de Westminster marque la véritable indépendance du dominion. 31 mai 1961 : "République d'Afrique du sud", + sortie du Commonwealth
Grande Bretagne
Algérie Angola Bénin / Dahomey jusqu'en 1975 Botswana /
Bechuanaland jusqu'en 1966
3 juillet 1962 11 novembre 1975 1er août 1960
France Portugal France
30 septembre 1966 (protectorat britannique devient indépendant au sein du Commonwealth) 1er juillet 1962
Grande Bretagne
Burundi
Mandat SDN Belge d'Urundi (avec le Rwanda) France
Burkina Faso /
Haute‐Volta jusqu'en 1984
5 août 1960
Cameroun
1er janvier 1960 (Cameroun oriental ) 1er octobre 1961 (Cameroun Occidental + partie
nord du Cameroun occidental rattachée au Nigeria )
France Grande‐ Bretagne Portugal France
Mandat SDN
Cap‐Vert Centrafrique / ex République centrafricaine/ex‐ Oubangui‐Chari Comores
5 juillet 1975 13 août 1960
6 juillet 1975 (déclaration unilatérale) 3 janvier 1976 (la France renonce à sa
France
Yveline Dévérin – Géopolitique de l'Afrique souveraineté)
Exception de Mayotte qui demande à rester française
Congo (dit "Congo‐ Brazzaville") Congo (RdC)/ ex‐
Zaïre
15 août 1960 30 juin 1960 7 août 1960 27 juin 1977
France Belgique France France
Côte d’Ivoire Djibouti (ex Côte française des Somalis, ex Territoire des Afars et des Issas) Égypte
28 février 1922, mais contrôle militaire ...