On considère la révolution populaire arabe qui s’est déroulée en Tunisie et en Égypte, comme étant la révolution de masses la plus importante qui ait eu lieu à l’époque contemporaine après les révolutions française, bolchevique et iranienne. Aujourd’hui, dans le monde arabe, on assiste à une approbation populaire générale de cette révolution en raison de son opposition à l’injustice. Elle est aussi considérée comme un passage obligé après une phase de « blocage » par laquelle est passée la société arabe. Elle est également unanimement acceptée car elle est l’expression de la voix des masses ; voix qui est restée très longtemps dans l’attente.L’idée de l’expression des masses par elles-mêmes est le plus important problème qui se présente à nous. Ancrée dans l’imaginaire arabe et islamique, l’image négative des masses et du peuple en général a été bouleversée par cette révolution. Notre histoire arabe est une histoire des « élites ». De nombreuses pages de notre patrimoine littéraire, qu’il n’est pas utile de citer, rabaissent les masses et le grand public. Elles les décrivent comme étant de la « racaille », des « rebuts » ou uniquement comme des « petites gens ». Ces pages de notre patrimoine littéraire ont peu fait l’éloge des masses comme le fit Ali ibn Abi Talib, qu’Allah soit satisfait de lui, lorsqu’il dit : « Le peuple de la communauté est le pilier de la religion, ce qui rassemble les musulmans et l’arme pour combattre les ennemis Cette représentation négative du peuple existait aussi en Occident. Le philosophe anglais Thomas Hobbes fut le premier à avoir étudié le terme « peuple » dans son livre Le Citoyen (1). Il dit au sujet du peuple qu’il est composé de « barbares », en raison de leur amour de la guerre, et que le mal fait partie de sa nature. Au XIXème siècle, le philosophe hollandais, Spinoza exposa une autre idée. En parlant du peuple, il utilisa le terme « foule » qu’il considère, dans son Traité théologico-politique (2), comme un être doté d’une