La science politique et l’étude des partis politiques
La science politique et l’étude des partis politiques
L’analyse réaliste des partis politiques, qui part de l’observation concrète des pratiques partisanes plutôt que de ce que les partis devraient être ou des fonctions qu’ils sont censés remplir, n’a pas attendu l’émergence institutionnelle de la science politique. Elle est concomitante du développement, entre la seconde moitié du XIXe siècle et les vingt premières années du XXe siècle, de la démocratie de masse, période durant laquelle les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, puis l’Allemagne, la Belgique, et enfin la France et l’Italie voient apparaître des organisations durables, de caractère fédéral ou confédéral, dont le but affiché est la conquête pacifique, via les élections, des postes de pouvoir politique. Dès le début de ce siècle en effet, Moisei Ostrogorski, Roberto Michels et Max Weber1 définissent les contours de ce qui deviendra, après la Seconde guerre mondiale, un des terrains de prédilection de la science politique. Ces trois auteurs, qui sont les premiers à aborder de front le problème de l’organisation concrète de la démocratie de masse, se caractérisent d’abord, au-delà de leurs différences, par le refus d’adopter le point de vue normatif prédominant jusqu’alors, lequel considère l’existence des partis comme contradictoire avec le principe de la volonté générale et avec la nécessaire unité de la nation. Tous les trois partagent l’idée, pour reprendre la formulation de Weber, que «ces nouvelles formations sont des enfants [...] du suffrage universel, de la nécessité de recruter et d’organiser les masses» (p. 154). Michels va même plus loin en voyant les partis comme un moyen d’émancipation politique des «faibles» : «la démocratie ne se conçoit pas sans organisation, écrit-il. L’organisation est, entre les mains des faibles, une arme de lutte contre les forts» (p. 25). Cette commune perspective