– Le bonheur consiste-t-il dans la satisfaction des désirs ?
Nous venons de voir que d’un côté, la satisfaction effrénée des désirs semblait vouée à l’échec si les désirs se renouvellent sans cesse, si chaque désir satisfait laisse place à un autre désir à satisfaire. Une telle quête risque bien d’être infinie et de nous enfermer dans une frustration permanente, dans un désir qui se complaît dans la tension vers une multiplicité d’objets, un désir qui s’éparpille en désirs. Dans cette perspective, la plénitude qu’est le bonheur paraît bien loin et il faudrait se contenter au mieux de petits plaisirs ponctuels. Mais d’un autre côté, dans l’hypothèse où nous pourrions satisfaire tous nos désirs, devrions-nous souhaiter une telle satiété ? Rousseau nous a montré qu’un être sans peine, sans manque était malheureux et comme mort. Celui qui n’a plus rien à désirer risque, au mieux, l’ennui le plus total, au pire la mort. Il faudrait donc ne pas épuiser le désir : d’une part, nous pouvons penser que le désir n’est pas toujours l’expression d’un manque mais peut porter sur ce que l’on a, en un sens figuré, dans l’amour par exemple ; c’est alors lui-même que désire le désir. Ce qui compte pour être heureux ce n’est pas tant d’atteindre les multiples objets du désir mais bien le fait de désirer. D’autre part, si nous devons satisfaire certains désirs seulement, il s’agit de savoir lesquels.
Quels désirs devons-nous satisfaire ?
Nous ne maîtrisons probablement pas l’apparition de nos désirs et, si nous pouvons œuvrer dans ce sens, c’est en commençant par réguler leur satisfaction. Autre chose est de satisfaire nos désirs quand nous le pouvons, autre chose est de considérer que le bonheur réside dans cette satisfaction. Ne faut-il pas alors distinguer différents types de désirs afin de comprendre qu’il est vain de rechercher le bonheur dans leur satisfaction ? Si seuls quelques désirs sont à satisfaire, lesquels et pourquoi ? Dans la Lettre à Ménécée, Epicure