le commentaire Les faux beaux jours
NOTES SUR LES FAUX BEAUX JOURS ONT LUI TOUT LE JOUR (Pièce VII du recueil Sagesse de Paul Verlaine)
UNE TENTATION DES PIRES
1.
L'âme émiettée en douze coups :
"Les faux beaux jours ont lui tout le jour, ma pauvre âme" (vers 1)
Vers à monosyllabes. C'est toujours assez virtuose, ça le douze coups, de l'archet qui connaît bien son violon. C'est du pizzicato, comme on dit en musique, de la corde pincée. Avec de l'écho encore, le mot "jour" qui scande le vers, non pas en deux hémistiches, mais de manière à ce qu'il fasse entendre le mot "jour", et le mot "âme" aussi, qui le finit, féminine et notes liées, le vers. Ainsi, à mon avis, il faut rythmer le vers comme ceci :
"Les faux beaux jours / ont lui tout le jour / ma pauvre âme".
Le réel est plein de faux, et l'âme pauvre. C'est ce qu'il nous dit, le narrateur à "pauvre âme", vu que c'est à lui-même qu'il s'adresse, le soliloque.
2.
De la musique. C'est là où Verlaine est le plus à son aise, dans le rythme et l'assonance, c'est ce qui le sauve de la platitude bondieusarde et de la miévrerie :
"Les faux beaux jours ont lui tout le jour, ma pauvre âme,
Et les voici vibrer aux cuivres du couchant." (vers 1-2)
Verlaine, ce qu'il fait, c'est diffuser du son dans le paysage, c'est mettre le décor en musique.
Echos : "faux beaux" dont le "o" s'ouvre dans l'épithète "pauvre".
Echos : le participe "lui" et le mot "cuivres".
Echos : la labio-dentale "v" (cf "voici", "vibrer", "cuivres").
Echos : le palato-vélaire [k] (cf "cuivres", "couchant").
Echos : l'assonance "i" ("lui", "voici", "vibrer", "cuivres").
C'est par le son que Verlaine décrit. Par le jeu des sonores ("v") et des sourdes ([k]). Plus que par l'image. Au départ, c'est même assez vague. C'est quoi, ces "faux beaux jours" qui "ont lui tout le jour" ? De la lumière. "Les faux beaux jours", c'est le passé aussi, celui des "fêtes" qu'on aurait voulu "galantes" et qui furent vulgaires,