Au contraire, la mmoire est une reconstructionslectivedu pass. Elle volue, elle est particulire un groupe dindividus puisquelle se construit essentiellement partir de tmoignages. Lvolution de la mmoire suit gnralement plusieurs tapes dabordrefoule, elle est ensuite ravive et enfin saffirme pour devenir un objet de la recherche historique. partir des annes 1990, les mmoires dvnements particulirement douloureux de notre histoire, comme celle du gnocide des Juifs, du rgime de Vichy et de la guerre dAlgrie, deviennent un enjeu politique. De nombreuses lois visant lutter contre loubli sont votes comme la loi Gayssot contrele ngationnismeen juillet 1990. Des historiens sinquitent de cette obsession mmorielle. Ils la voient comme laboutissement dactionscommunautaristes. Pour eux, il nexiste pas de devoir de mmoire mais bien un devoir dhistoire. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les autorits ngligent la mmoire des soldats franais vaincus en 1940, des victimes du service du travail obligatoire et des dports raciaux. Lesystme concentrationnaireest considr dans sa globalit, la spcificit du Gnocide des Juifs nest pas mise en avant. Ainsi, en 1955, le film documentaire dAlain ResnaisNuit et Brouillardne souligne pas cette spcificit. De plus, le tmoignage des rescaps est difficile entendre pour ceux qui nont pas connu les camps et les survivants sont peu nombreux (seulement 6 des dports ont survcu).Lampleur de la Shoah nest pas encore perue par lopinion publique. Enfin, les associations juives souhaitent avant tout participer la reconstruction de lunit nationaleet veulent viter de se singulariser dans une France qui soigne encore les plaies de lpuration. Ce nest qu la fin des annes 1970 que lathse ngationnistede Robert Faurisson est publie et dans les annes 1980 que souvrent les procs Barbie et Papon. Cest donc bien le procs dAdolf Eichmann, en 1961, et lappel la barre de nombreux rescaps, qui ouvrelre du tmoin la mmoire de la Shoah est ravive une premire fois.