Le renard chez la fontaine
Les Grands, pour la plupart, sont masques de théâtre;
Leur apparence impose (1) au vulgaire idolâtre.
L'Âne n'en sait juger que par ce qu'il en voit :
Le Renard, au contraire, à fond les examine,
Les tourne de tout sens ; et, quand il s'aperçoit Que leur fait (2) n'est que bonne mine,
Il leur applique un mot qu'un Buste de héros Lui fit dire fort à propos.
C'était un Buste creux, et plus grand que nature.
Le Renard, en louant l'effort de la sculpture:
«Belle tête, dit-il, mais de cervelle point.»
Combien de grands Seigneurs sont Bustes en ce point!
LE RENARD ET LES POULETS D’INDE
Contre les assauts d'un renard
Un arbre à des dindons servait de citadelle.
Le perfide ayant fait tout le tour du rempart, Et vu chacun en sentinelle,
S'écria : Quoi ces gens se moqueront de moi !
Eux seuls seront exempts de la commune loi !
Non, par tous les Dieux, non ! Il accomplit son dire.
La lune, alors luisant, semblait, contre le Sire,
Vouloir favoriser la dindonnière gent (1).
Lui qui n'était novice au métier d'assiégeant
Eut recours à son sac de ruses scélérates,
Feignit vouloir gravir, se guinda sur ses pattes,
Puis contrefit le mort, puis le ressuscité. Harlequin (2) n'eût exécuté Tant de différents personnages.
Il élevait sa queue, il la faisait briller, Et cent mille autres badinages.
Pendant quoi nul Dindon n'eût osé sommeiller :
L'ennemi les lassait en leur tenant la vue Sur même objet toujours tendue.
Les pauvres gens étant à la longue éblouis (3),
Toujours il en tombait quelqu'un : autant de pris,
Autant de mis à part ; près de moitié succombe.
Le Compagnon les porte en son garde-manger.
Le trop d'attention qu'on a pour le danger Fait le plus souvent qu'on y tombe.
LE RENARD ET LES RAISINS (*)
Certain Renard gascon, d'autres disent normand,
Mourant presque de