Le roman d'auteur en auteur.
ROMAN - De Balzac au nouveau roman
Les auteurs du nouveau roman ont beaucoup fait depuis une quinzaine d'années pour dessiner les grandes lignes de l'évolution du roman de Balzac à Butor. On serait tenté de montrer quelque scepticisme à l'égard de l'histoire du roman telle qu'ils la présentent parfois. Cela dit, et la part étant faite de ce qui relève de la publicité ou des nécessités de la polémique, il reste que, comme Robbe-Grillet l'a noté, " le nouveau roman aura eu en tout cas le mérite de faire prendre conscience à un public assez large [...] d'une évolution générale du genre ". De Balzac à Zola, de Zola à Proust, de Proust à Sartre, de Sartre à Butor, le roman a changé. Il a changé d'objet, de procédés, de desseins. Ses formes successives ont été en rapport avec les transformations de la société, quand ce n'était pas sous le coup des bouleversements de l'histoire ; avec les progrès des autres arts, en particulier, du cinéma ; avec l'influence croissante des romans étrangers. En même temps, une sorte de malaise s'installait chez beaucoup de romanciers ; depuis Bouvard et Pécuchet , ou bien depuis Paludes , on était entré dans ce qu'on a appelé depuis l'" ère du soupçon " : il paraissait de plus en plus difficile de raconter avec aplomb une histoire captivante.
1. De Balzac à Zola
Le roman, miroir de la société
Déjà en son temps, Balzac avait proposé au roman des ambitions nouvelles. Dans le célèbre avant-propos à La Comédie humaine (1842), il s'était proclamé l'historien des mœurs, décrivant Paris et la province, la noblesse et la bourgeoisie, l'armée et le clergé, la presse et l'édition. " La société française, disait-il, allait être l'historien, je ne devais être que le secrétaire. " De Balzac à Zola, et quelles que soient les différences qu'il comporte, le roman se propose d'être comme le miroir du XIXe siècle. Waterloo est raconté dans Les Misérables , il l'avait été dans La Chartreuse de Parme. La révolution de 1848 était évoquée