Lang décrit luimême la façon dont il s’est adapté au cinéma parlant à une époque où il y avait encore peu de films parlants en Allemagne : « Je pris conscience que le son non seulement pouvait être utilisé comme élément dramatique, mais devait l’être ». La première séquence du film M le maudit est particulièrement intéressante de ce point de vue, pour la façon dont Lang a utilisé les possibilités du son à des fins dramatiques, et donc pas seulement réalistes. Elle l’est également parce qu’il semble que Lang ait voulu expérimenter toutes sortes de possibilités du nouveau cinéma parlant, en jouant, par exemple, des différentes associations de l’image et du son, du rôle du hors champ, et aussi du rôle du silence. Il le dit d’ailleurs luimême : « Comme M était mon premier film parlant, j’ai fait des expériences avec le son, qui n’étaient évidemment pas possibles dans le cinéma muet. » Les choix techniques permettent de préciser ce qui vient d’être dit : M le maudit a été tourné en studio, mais avec une prise de son directe. Celleci renforce l’authenticité des bruits, ce qui va dans le sens d’une recherche de réalisme ; c’est cet aspect du son qu’on appelle le « rendu » et qui importe pour créer les ambiances et les effets de réel. Mais le studio permet de choisir les sons qu’on veut et de supprimer les autres ; la même technique qui permettait le réalisme favorise donc aussi l’artifice par la maîtrise des effets sonores. La première séquence de M le maudit tire peutêtre son caractère poignant de cette scénographie du son que Lang expérimente dans ses multiples possibilités. En tout cas nous montrerons que le son joue ici un rôle dramatique de premier plan. Le schéma cijoint (cf. plus bas, p. 9) tente de proposer un équivalent visuel, non pas du son 1 luimême , mais seulement des rapports entre l’image et le son. Résumé de la première séquence 1 – Image noire, mais on entend déjà