Les lettres portugaises
Histoire de l’œuvre
Quand les Lettres portugaises paraissent en 1669 chez Claude Barbin, un petit libraire parisien, le succès est immédiat. L’œuvre deviendra le modèle, sans cesse imité, de la lettre amoureuse, et même, plus loin, d’un art d’aimer : Stendhal, dans la vie de Rossini : « il faut aimer comme la religieuse portugaise, et avec cette âme de feu dont elle nous a laissé une si vive empreinte dans ses lettres immortelles ». Si ces lettres ont traversé les siècles, on peut expliquer leur extraordinaire succès par leur qualité littéraire évidente, mais aussi par le mystère qui a longtemps entouré l’œuvre. L’histoire des Lettres Portugaises est, en elle-même, un roman (lire l’avertissement au lecteur). Les Lettres sont donc anonymes et présentées comme authentiques. Dès la première publication chez Barbin, le public est en haleine. Elles resteront longtemps un livre à la mode et inspireront pendant plus d’un siècle d’innombrables ouvrages dans le monde entier. Le débat sur l’authenticité des Lettres fait rage. Une édition étrangère, datée de 1669, précise : « Le nom de celui auquel on les a écrites est M. le chevalier de Chamilly, et le nom de celui qui en a fait la traduction est Cuilleraque ». Ce « Cuilleraque » n’est autre que Guilleragues, un courtisan célèbre pour son esprit. Pourquoi aucun témoignage contemporain ne nous est-il jamais parvenu le désignant comme auteur des fameuses Lettres ? Il faut comprendre pourquoi ses amis (Racine, Boileau, Mme de Sévigné ou Mme de La Sablière) devaient se montrer discrets : trahir publiquement Guilleragues, c’était lui nuire, et c’était aussi déplaire au Roi qui avait fait de lui le