Les ordres en architecture greco-romaine
Il n'est guère d'autre domaine de l'art occidental où l'héritage grec se soit pérennisé autant qu'en architecture : les ordres progressivement mis au point par les Grecs se sont transmis jusqu'au seuil du XXe siècle, en sorte que toute l'architecture monumentale de pierre de l'Occident a, pendant vingt-cinq siècles, parlé peu ou prou ce langage clairement articulé, auquel elle a su faire dire des choses bien différentes. Il aura fallu la mutation technique de la fin du XIXe siècle, liée à l'apparition d'autres matériaux : les métaux, le béton, le verre, pour que l'architecture contemporaine s'éloigne de cette sempiternelle grammaire formelle. La notion d'ordre en architecture Dans l'architecture grecque, un ordre est un ensemble cohérent d'éléments dont la syntaxe fixe le plan, mais surtout l'élévation d'un bâtiment. En fait, seul l'ordre dorique répond pleinement à cette définition : l'ordre ionique, plus souple, présente toutes sortes de variantes régionales ; quant aux ordres romains, ce sont des adaptations des ordres grecs, simplifiés ou combinés. L'existence des deux ordres fondamentaux est attestée par l'archéologie dès le début du VIe siècle avant J.-C. Le premier texte conservé qui les définisse est le traité en latin dédié à Auguste par Vitruve, vers 25 avant J.C. Ingénieur hydraulicien et architecte militaire, celui-ci ne semble guère avoir construit qu'une basilique dans une petite ville d'Italie. Son traité, le De Re Architectura, n'est donc pas le fruit d'une expérience personnelle, mais une synthèse fondée sur les ouvrages des grands architectes grecs, qu'il vulgarise avec plus ou moins de bonheur, proposant ainsi des recettes commodes pour les bâtisseurs romains. Pour Vitruve, les deux ordres, dorique et ionique, ne correspondent pas seulement à des distinctions géographiques et ethniques : l'un reproduit les proportions du corps masculin, l'autre celles du corps féminin ; au dorique la force robuste, à