Les origines du roman
Le roman est sans doute le lieu du plus grand des secrets, celui que l'on ne peut avouer et que Freud appelait le roman familial des névrosés. De quoi s'agit-il ? Marthe Robert - retient que le jeune enfant passe par deux types de scénarios : celui de l'enfant trouvé qui s'imagine né d'une famille royale, puis celui du Bâtard qui relègue le père dans un royaume de fantaisie (l'éloigne, s'en débarrasse...). Ces deux attitudes se retrouvent dans le genre romanesque et, pour Marthe Robert, le définissent en tant que tel. Le roman n'a pas de formes fixes déterminées mais un contenu obligé, celui de rendre compte du "roman familial de l'enfance". Le conte s'arrête au seuil de la chambre conjugale, les personnages y sont anonymes, et figurent d'un côté les méchants, puissants et vieux, et de l'autre les opprimés faibles et jeunes. Le véritable roman naît avec l'arrivée du bâtard, lorsque, sans renoncer à ses visions de paradis, le genre s'éveille aux exigences de la réalité œdipienne. Surgissent alors Don Quichotte et Robinson Crusöé. Don Quichotte prétend s'engendrer lui-même, il se passionne pour les familles fictives (livres de chevaleries) se conduit en Enfant Trouvé (est d'avis que tout lui est dû parce qu'il fait grand bruit de son désintéressement), mais le monde que lui offre Cervantès se moque de lui et le corrige.
On notera au passage qu'il est fort probable que Cervantès ait été juif marrane et donc contraint sous l'Inquisition de cacher son identité " ce qui conduit le romancier non pas exactement à militer pour ses convictions, mais à voir clair tout en restant dans le doute quant à la validité de ses propres choix intellectuels. "
Robinson Crusoé, quant à lui, rompt une fois pour toute avec ses parents qu'il renie, retombant ainsi à l'état préœdipien, mais pour la première fois dans un roman, la terre du rêve doit être défrichée à l'aide d'outils, de calculs, d'expérience… Après une longue période