Les pires tyrans sont ceux qui savent se faire aimer
C’est en Grèce antique que l’on qualifia pour la première fois un régime de tyrannique et que l’on parla d’un tyran pour désigner un gouvernant, un homme qui exerçait le pouvoir d’une façon particulière. On appelle alors tyran tout homme qui, dans une Cité, s’empare illégalement du pouvoir et le conserve par la force au mépris des lois. Ces gouvernants tyranniques se sont effectivement installés à la fin du 8ème siècle avant Jésus Christ en Asie mineure et dans le Péloponnèse, après des périodes de trouble. Souvent le tyran n’est pas un inconnu : il peut être un aristocrate, avoir exercé une magistrature dans des conditions légales, mais devient tyran quand il refuse de restituer le pouvoir et le conserve pour lui seul. Il écarte alors les représentants d’un risque pour sa personne: hommes d’Etat, penseurs, militaires de haut rang et installe un gouvernement absolutiste qu’il dirige seul. La tyrannie est marquée par une primauté de l’intérêt personnel du tyran. L’Histoire laisse-t-elle trace de bons tyrans ? Qu’est-ce qu’un bon tyran ? Y aurait-il une échelle dans la tyrannie dans laquelle s’opposeraient des tyrannies respectables au pire des tyrans ? Une telle échelle de la tyrannie est-elle recevable ? Spinoza écrira à ce sujet que « les pires tyrans sont ceux qui savent se faire aimer ». Le sujet présuppose donc qu’il existe des tyrans pires que d’autres et que dans cette mesure de « l’abomination » d’un tyran par rapport à un autre, ce qui prime est l’affectif, ce lien particulier qui lie le gouvernant aux gouvernés, et qui serait ici un lien positif d’amour. Reste à expliciter ce que l’on entend ici par amour. Il ne s’agit pas, a priori, d’un lien amoureux, mais plutôt d’une relation de confiance et d’abandon de cette confiance que le peuple opère au profit du tyran. Il s’agit donc d’aimer dans un sens plutôt philosophique, comme les Anciens aimaient la sagesse, les pires tyrans sont ceux qui