Les racines du nouvel état de droit
Xavier Philippe
Xavier Philippe est professeur de droit public à l’université Paul Cézanne - Aix-Marseille III et à l'université de Western Cape (Le Cap)- Afrique du sud.
Article écrit le 02 mai 2005
C’est autour du droit que s’est reconstruit l‘Etat. Expérience unique de synthèse entre plusieurs influences juridiques, internes et extérieures.
Le succès de la transition sud-africaine du régime d’apartheid vers la démocratie s’est répercuté à travers des images emblématiques dont la figure du président Nelson Mandela est la plus forte. Un tel « miracle » ne s’est pas produit sans transformation des structures et des règles juridiques. Nombre de personnes ont travaillé dans l’ombre et permis l’adoption d’une nouvelle Constitution démocratique, qui a puisé ses sources dans les traditions historiques du régime juridique, tout en bénéficiant des instruments modernes du constitutionnalisme comparé. La nouvelle Afrique du sud a prouvé qu’un État pouvait se créer en développant un régime juridique mixte.
Un rappel de la situation juridique antérieure s’impose pour comprendre le rôle du droit dans la transition. L’Afrique du sud, contrairement à ce que l’on pourrait croire, n’appartient pas à une famille juridique définie – tradition de Common Law ou tradition de droit civil (droit écrit) [1]. Elle a toujours emprunté à ces deux régimes pour déboucher sur un système de droit mixte. Ayant connu des phases successives de colonisation par les Hollandais puis par les Anglais, les Sud-Africains ont appliqué parallèlement le Roman-Dutch Law (droit écrit) dans certaines branches du droit et la Common Law dans d’autres. Ce particularisme s’est doublé historiquement d’une reconnaissance des droits coutumiers dans les rapports interpersonnels (droit civil, droit commercial, certaines infractions pénales), justifiant que la Common Law ne constitue qu’un droit par défaut lorsque les parties ne réclamaient pas au juge l’application d’un