Les travailleurs de la mer, les vents hugo commentaire de texte
Les vents courent, volent, s’abattent, finissent, recommencent, planent, sifflent, mugissent, rient ; frénétiques, lascifs, effrénés, prenant leurs aises sur la vague irascible. Ces hurleurs ont une harmonie. Ils font tout le ciel sonore. Ils soufflent dans la nuée comme dans un cuivre, ils
5 embouchent l’espace, et ils chantent dans l’infini, avec toutes les voix amalgamées des clairons, des buccins, des oliphants, des bugles et des trom- pettes, une sorte de fanfare prométhéenne. Qui les entend écoute Pan.
Ce qu’il a d’effroyable, c’est qu’ils jouent. Ils ont une colossale joie compo- sée d’ombre. Ils font dans les solitudes la battue des navires. Sans trêve,
10 jour et nuit, en toute saison, au tropique comme au pôle, en sonnant dans leur trompe éperdue, ils mènent, à travers les enchevêtrements de la nuée et de la vague, la grande chasse noire des naufrages. Ils sont des maîtres de meutes. Ils s’amusent. Ils font aboyer après les roches les flots, ces chiens.
Ils combinent les nuages et les désagrègent. Ils pétrissent, comme avec
15 des millions de mains, la souplesse de l’eau immense.
Victor Hugo (1802-1885) Les Travailleurs de la mer (1866)
Les Travailleurs de la Mer, écrit par Victor Hugo et publié en 1866 devait s’intituler
Les Abîmes. Cette œuvre a été écrite lors de son séjour à Guernesey, une île Anglo-normande bordée par une mer sévère et douce, comme le dit Victor Hugo. Dans ce roman, Lethierry et Gilliatt, les deux personnages principaux affrontent héroïquement la violence des tempêtes et de la faune marine. Ainsi, notre extrait décrit les vents et ses activités dans un court paragraphe de quatorze phrases. Tout d’abord, le registre épique vise à montrer les vertus héroïques des vents. Ensuite, Pan se trouve au cœur du texte par ses différents aspects donnant un caractère mythologique à ce passage. Enfin, Dieu est à l’origine de la création du monde et les vents celui de sa destruction.