Litterature classique
Madame de La Fayette
1689
Sommaire • Le libraire au lecteur • Première partie • Deuxième partie • Troisième partie • Quatrième partie
La Princesse de Clèves
1689
Sommaire
LE LIBRAIRE AU LECTEUR.
Quelque approbation qu’ait eu cette Histoire dans les lectures qu’on en a faites, l’Autheur n’a pu se résoudre à se déclarer ; il a craint que son nom ne diminuast le succès de son Livre. Il soit par expérience que l’on condamne quelquefois les Ouvrages sur la médiocre opinion qu’on a de l’Auteur et il soit aussi que la réputation de l’Autheur donne souvent du prix aux Ouvrages. Il demeure donc dans l’obscurité où il est, pour laisser les jugemens plus libres et plus équitables, et il se montrera néanmoins si cette Histoire est aussi agréable au public que je l’espère.
PREMIÈRE PARTIE
La magnificence et la galanterie n’ont jamais paru en France avec tant d’éclat, que dans les dernières années du règne de Henri second. Ce Prince estoit galand, bien fait, et amoureux ; qouique sa passion pour Diane de Poitiers, Duchesse de Valentinois, eust commencé il y avoit plus de vingt ans, elle n’en estoit pas moins violente, et il n’en donnoit pas des témoignages moins éclatans.
Comme il réussissoit admirablement dans tous les exercices du corps, il en faisoit une de ses plus grandes occupations. C’estoit tous les jours des parties de chasse et de paulme, des balets, des courses de bagues, ou de semblables divertissemens. Les couleurs et les chiffres de Mme de Valentinois paroissoient par tout, et elle paroissoit elle-mesme avec tous les ajustemens que pouvoit avoir Mlle de la Marck, sa petite-fille, qui estoit alors à marier.
La présence de la Reine autorisoit la sienne. Cette Princesse estoit belle, qouyqu’elle eust passé la premiere jeunesse ; elle aimoit la grandeur, la magnificence, et les plaisirs. Le Roy l’avoit épousée lorsqu’il estoit encore Duc d’Orleans, et qu’il avoit pour aisné le Dauphin, qui mourut