littérature
D E
pables, ni tout à fait innocents », pourrait-on dire en paraphrasant la Préface qui cite elle-même La Poétique d’Aristote. Seule Aricie semble échapper pour le moment à ce principe d’écriture des personnages.
ACTE IV SCÈNE 2
COMMENTAIRE COMPOSÉ
Cette scène marque un crescendo dans la colère de Thésée et dans le pathétique. Elle se caractérise en effet par la violence d’un affrontement inégal qui pose très tôt, sur le plan de l’écriture dramatique, les éléments du dénouement tragique, tout en représentant un moment où les enjeux de la parole théâtrale se manifestent le plus clairement.
La malédiction du père, ou le comble du pathétique.
• Le dispositif singulier de la violence verbale. La scène se développe en trois temps principaux, précédés d’un aparté de Thésée qui confère d’emblée sa tonalité pathétique à la question du signe et de l’erreur (vers 1035-1040). Le premier temps voit éclater la colère de Thésée aux vers 10411086, colère ponctuée par l’anaphore « Fuis » et culminant dans l’apostrophe à Neptune, à qui s’adresse l’imprécation du père contre le fils. Hippolyte tente ensuite de se défendre aux vers 1087-1138, et avoue à son père son amour pour
Aricie. Le dialogue s’achève aux vers 1139-1156 dans la division, partagé entre fureur (Thésée) et plainte
(Hippolyte).
Ce qui frappe dans cette composition en trois temps, c’est la manière dont la parole est l’instrument de la violence. La colère de Thésée apparaît d’emblée au point le plus haut et se nourrit des insultes adressées à Hippolyte (« perfide »,
« traître », « monstre », etc.), sans que nul dialogue ne soit
48
ACTE IV SCÈNE 2
L ’ Œ U V R E
possible. L’échange n’est d’ailleurs instauré que très progressivement : la première réplique de Thésée s’adresse à lui-même, et sa colère n’écoute pas la question d’Hippolyte, elle n’est qu’une parole lancée contre son fils, une imprécation qui ne cherche que la puissance du verbe, ignorant la parole de