Cet article recense les arguments d’auteurs, psychanalystes et sociologues, concernant les dysfonctionnements entraînés par la démarche qualité dans les institutions sanitaires, sociales et médico-sociales. La destruction des modes de fonctionnement antérieurs, la relégation de la réflexion sur les pratiques professionnelles au profit d’une logique gestionnaire, l’avènement du client en lieu et place du sujet, l’ignorance ou le déni des concepts permettant de penser les pratiques dans ces secteurs, l’individualisation de l’évaluation aux dépens du travail en équipe, la perte du pouvoir décisionnel des institutions par le biais de la gouvernance sont analysés au travers de quatre impacts majeurs de la démarche qualité : sur la relation entre professionnels et usagers, sur les professionnels eux-mêmes, sur le travail en équipe et sur les institutions. Une cinquième partie tente de saisir les attaches philosophiques de la démarche qualité. Trois fondements philosophiques sont retenus : le libéralisme économique, le pragmatisme anglo-saxon et l’utilitarisme. Les liens entre pragmatisme anglo-saxon et démarche qualité sont examinés plus minutieusement, en raison de l’influence grandissante du pragmatisme sur notre société. Aucune des trois influences ne s’avèrent cependant compatible avec notre propre héritage du côté de la philosophie des Lumières. La démarche qualité apparaît dès lors comme une figure paradigmatique d’une guerre philosophico-civilisationnelle, à l’œuvre dans des pans de plus en larges de notre société.
La perversion de la démarche
Une approche critique de la démarche qualité dans les institutions sanitaires, sociales et médico-sociales.
L’obligation légale faite aux institutions sanitaires, sociales et médico-sociales d’en passer par une démarche qualité pour évaluer leurs prestations et, est-il dit, pour mieux satisfaire leurs clients, soulève peu de commentaires chez les professionnels. Chacun semble s’y soumettre sans véritablement interroger