« Exprimer l'humanité dans une espèce d'oeuvre cyclique ; la peindre successivement et simultanément sous tous ses aspects, histoire, fable, philosophie, religion, science, lesquels se résument en un seul et immense mouvement d'ascension vers la lumière ; faire apparaître, dans une sorte de miroir sombre et clair que l'interruption naturelle des travaux terrestres brisera probablement avant qu'il ait la dimension rêvée par l'auteur cette grande figure une et multiple, lugubre et rayonnante, fatale et sacrée, l'Homme ; voilà de quelle pensée, de quelle ambition, si l'on veut, est sortie la Légende des Siècles ». Voici le dessein général de La légende des siècles, tel qu'il est défini par Victor Hugo lui-même dans la préface de cette oeuvre poétique colossale. Le texte qui nous occupe aujourd'hui s'intitule Orphée, il s'agit de la première oeuvre de cette section de La légende des siècles qui est celle des Idylles. Dans ce texte, Victor Hugo traite un thème majeur de la littérature occidentale qui est le mythe d'Orphée. Ce mythe porte sur un aède mythique de la Thrace, fils du roi agre et de la muse Calliope, qui savait par les accents de sa lyre charmer les animaux et émouvoir jusqu'aux êtres inanimés. Mais c'est à la partie du mythe qui concerne Orphée et la femme qu'il aime, Eurydice, qu'Hugo s'intéresse dans ce texte dont nous verrons qu'il représente une variation sur un thème maintes fois traité dans l'histoire de la Littérature. Si nous pouvons voir dans un premier temps que ce texte est une idylle composée de trois mouvements progressifs, nous étudierons ensuite de quelle manière Victor Hugo s'empare du mythe d'Orphée avant de voir que ce dernier représente l'une des figures hugoliennes de la glorification du poète. La question au centre de notre étude sera de voir de quelle manière Hugo reprend le mythe d'Orphée pour exprimer à travers lui une conception singulière de la fonction du