Montaigne

1344 mots 6 pages
Jacques, aveuglé, ôta ses lunettes, les essuya. Son cœur battait à grands coups, il ne sentait plus le froid. Mais, brusquement, la pensée lui vint d'une tranchée profonde, qui se trouvait à trois cents mètres environ de la Croix-de-Maufras : elle s'ouvrait dans la direction du vent, la neige devait s'y être accumulée en quantité considérable ; et, tout de suite, il eut la certitude que c'était là l'écueil marqué où il naufragerait. Il se pencha. Au loin, après une dernière courbe, la tranchée lui apparut, en ligne droite, ainsi qu'une longue fosse, comblée de neige. Il faisait plein jour, la blancheur était sans bornes et éclatante, sous la tombée continue des flocons.

Cependant, la Lison filait à une vitesse moyenne, n'ayant plus rencontré d'obstacle. On avait, par précaution, laissé allumés les feux d'avant et d'arrière ; et le fanal blanc, à la base de la cheminée, luisait dans le jour, comme un œil vivant de cyclope. Elle roulait, elle approchait de la tranchée, avec cet œil largement ouvert. Alors, il sembla qu'elle se mît à souffler d'un petit souffle court, ainsi qu'un cheval qui a peur. De profonds tressaillements la secouaient, elle se cabrait, ne continuait sa marche que sous la main volontaire du mécanicien. D'un geste, celui-ci avait ouvert la porte du foyer, pour que le chauffeur activât le feu. Et, maintenant, ce n'était plus une queue d'astre incendiant la nuit, c'était un panache de fumée noire, épaisse, qui salissait le grand frisson pâle du ciel.

La Lison avançait. Enfin, il lui fallut entrer dans la tranchée. A droite et à gauche, les talus étaient noyés, et l'on ne distinguait plus rien de la voie, au fond. C'était comme un creux de torrent, où la neige dormait, à pleins bords7. Elle s'y engagea, roula pendant une cinquantaine de mètres, d'une haleine éperdue, du plus en plus lente. La neige qu'elle repoussait, faisait une barre devant elle, bouillonnait et montait, en un flot révolté qui menaçait de l'engloutir. Un instant, elle parut

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