Mutualité
Premier mouvement social français par son ancienneté – on trouve une référence à une société de secours mutuel* dès l’an 1319 –, la mutualité a contribué au développement de la protection sociale dans le domaine de la santé et, peu à peu, des retraites sur la base de pratiques démocratiques et en opposition aux modèles assurantiels : les cotisations* étant forfaitaires, voire proportionnelles, aux revenus et non établies en fonction du risque propre à l’assuré. Les premières mutuelles se développent avec la révolution industrielle, vers 1820. En 1848, 2 000 sociétés regroupent en France 250 000 sociétaires* qui, avec leur famille, représentent 1,6 million de personnes. En raison de la loi Le Chapelier (1791) qui interdit toute « coalition », le monde du travail n’a pas le droit de s’organiser : il le fait toutefois dans le cadre des sociétés de secours mutuel qui prennent en charge obsèques et maladies, tout en menant des luttes revendicatives, telles que la révolte des Canuts à Lyon.
En 1852, Napoléon III définit un nouveau type de groupement dans un but d’intégration sociale. Ces « sociétés approuvées » bénéficient de nombreux avantages, mais au détriment de leur vie démocratique : elles sont dirigées par des membres bienfaiteurs, les notables, qui ne reçoivent aucune prestation, mais les adhérents n’y ont plus de responsabilité. Elles recrutent sur la base géographique de la commune où se rencontrent toutes les classes sociales et, loi Le Chapelier oblige, n’ont pas le droit de se regrouper ; les débats politiques y sont interdits. En 1870, sur 5 700 sociétés existant en France, 4 200 sont des sociétés approuvées qui réunissent 670 000 personnes encadrées par 110 000 membres bienfaiteurs. Cette « mutualité impériale » représente un instrument de contrôle social des riches sur les pauvres, tout en contribuant à la médicalisation du pays par le biais de pratiques paternalistes.
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