Nonm
Mignonne, allons voir si la rose…
Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avait déclose
Sa robe de pourpre au soleil,
A point perdu cette vesprée1
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vôtre pareil.
Las! voyez comme en peu d'espace,2
Mignonne, elle a dessus la place,
Las, las ses beautés laissé choir
O vraiment marâtre Nature,
Puisqu'une telle fleur ne dure
Que du matin jusques au soir !
Donc, si vous me croyez, mignonne
Tandis que votre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez votre jeunesse:
Comme à cette fleur, la vieillesse
Fera ternir votre beauté.
Pierre de Ronsard, Odes, I, 17 (1550/1552)
1. vesprée= ce soir
2. espace =temps
Originalité de Ronsard par rapport à ses prédécesseurs
« On notera que Tibulle ne compare pas la femme à la fleur, que Properce ne parle que de guirlandes de fleurs déjà coupées, et que, chez Ovide, le thème de la fleur, à peine indiqué, est loin d'occuper la place d'honneur : il est associé à ceux de l'eau qui s'écoule et de l'heure qui fuit. La source la plus certaine et la plus directe de l'ode de Ronsard est dans l'idylle latine des Roses, du poète bordelais Ausone. Pour la première fois, nous voyons ici des roses qui s'ouvrent et qui se fanent entre le matin et le soir. Le poète français semble avoir été séduit par les teintes pourprées, les images qui assimilent la rose à une jeune femme ; il a retenu l'apostrophe à la Nature et le conseil final. Mais il y a loin de ce passage touffu et prolixe à l'admirable pureté de ligne que présente l'ode Ronsard, un des rares poèmes qu'il n'ait jamais éprouvé le besoin de corriger. »
Jean Pierre Weill et Thérèse Weill, Documents, Collection Lagarde et Michard, Bordas, 1992
« Je vous envoie un bouquet… »
Je vous envoie un bouquet que ma main
Vient de trier de ces fleurs épanies[1] ;
Qui ne les eût à ce vêpre cueillies[2],
Chutes à terre elles fussent demain.
Cela