Notes nouvelles sur Edgar Allan Poe.IV
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TEXTE : « La poésie , pour peu qu’on veuille descendre en soi-même , interroger son âme , rappeler ses souvenirs d’enthousiasme , n’a pas d’autre but qu’elle même ; elle ne peut pas en avoir d’autre , et aucun poème ne sera si grand , si noble , si véritablement digne du nom de poème , que celui qui aura été écrit uniquement pour le plaisir d’écrire un poème . Je ne veux pas dire que la poésie n’ennoblisse pas les mœurs , - qu’on me comprenne bien - , que son résultat final ne soit pas d’élever l’homme au-dessus du niveau des intérêts vulgaires ; ce serait évidemment une absurdité . Je dis que , si le poète a poursuivi un but moral , il a diminué sa force poétique ; et il n’est pas imprudent de parier que son œuvre sera mauvaise . La poésie ne peut pas , sous peine de mort ou de défaillance , s’assimiler à la science ou à la morale ; elle n’a pas la Vérité pour objet , elle n’a qu’Elle-même . Les modes de démonstration de vérité sont autres et sont ailleurs . […] C’est cet admirable , cet immortel instinct du Beau qui nous fait considérer la terre et ses spectacles comme un aperçu , comme une correspondance du Ciel . La soif insatiable de tout ce qui est au-delà , et que révèle la vie , est la preuve la plus vivante de notre immortalité . C’est à la fois par la poésie et à travers la poésie , par et à travers la musique , que l’âme entrevoit les splendeurs situées derrière le tombeau ; et quand un poème exquis amène les larmes au bord des yeux , ces larmes ne sont pas la preuve d’un excès de jouissance , elles sont bien plutôt le témoignage d’une mélancolie irritée , d’une postulation des nerfs , d’une nature exilée dans l’imparfait et qui voudrait s’emparer immédiatement , sur cette terre même , d’un paradis révélé . Ainsi , le principe de la poésie est strictement et simplement l’aspiration humaine vers une beauté supérieure .