Nouvelle : Dans la maison de campagne
J’avais loué, l’été dernier, une petite maison de campagne aux abords de Grenoble, à plusieurs lieues de Lyon, et j’allais y coucher tous les soirs. Je fis, au bout de quelques jours de mes précieuses vacances, la connaissance d’un agriculteur d’alentour, un homme de quarante à cinquante ans, qui étais le type le plus intéressant que j’eusse jamais vu. C’était un vieux campagnard, mais un campagnard enragé, toujours près de son champ, toujours sur son champ, toujours dans son champ. Il devait être né dans un champ, et il mourra bien certainement dans la moisson finale.
Un soir que nous nous promenions aux environs de sa demeure rustique, je lui demandai de me raconter quelques anecdotes de sa vie campagnarde. Voilà immédiatement mon bonhomme qui s’anime, se transfigure, devient éloquent, presque poète. Il avait dans le cœur une grande passion, une passion dévorante, irrésistible : la campagne.
« Ah ! me dit-il, combien j’ai de souvenir dans cette campagne que vous voyez là autour de nous ! Vous autres, habitants de la ville, vous ne savez pas ce qu’est la campagne. Mais écoutez un paysan prononcer ce mot. Pour lui, c’est la chose inconnu, vaste, perdue, le pays des mirages et des fantasmagories, où l’on voit, la nuit, des choses qui ne sont pas, où l’on entend des bruits étrange que l’on ne connaît point, où l’on tremble sans savoir pourquoi au simple bruit du vent traversant les arbres, comme en traversant l’endroit le plus terrifiant de toute la région : et c’est en effet le plus sinistre et stressant des endroit, celui où l’on n’a point de repos.
« Les champs sont bornés de paysan, et dans l’ombre, quand il n’y a pas de lune, on jurerait que la campagne est illimitée. Un montagnard n’éprouve point la même chose pour la montagne. Elle est souvent haute et imposante c’est vrai, mais elle souffle, elle est dangereuse, son chemin est interminable et plein d’obstacle ; tandis que la campagne est silencieuse, plus sûre, et