Nouvelle
Un des convives l’interrompit en lançant : « Qu’as-tu encore fait qui mérite notre attention? Tu as tué l’amant de ta femme ? »
Quelques rires gras fusèrent, et nous attendant à une bonne blague de la part de Jean, nous nous retournâmes vers ce dernier, rigolards, avant de de constater son air grave. Voyant que son expression nous avait calmés, il poursuivit :
*
« Je vous ai invités à ma table en mémoire à un ami, Raoul C…, décédé il y a exactement un an de cela. Il était spécial, refermé en lui-même, mais en le connaissant bien, il pouvait se montrer fort surprenant. A ma connaissance, j’étais son seul ami et une des rares personnes qu’il côtoyait en dehors de ses collègues de travail –il exerçait le métier de commis. « Alors que nous étions tous deux en voyage en Bretagne, il y a un an, et que nous résidions dans une auberge près de la côte, Raoul disparut deux jours durant. Alors seulement que je commençais à m’inquiéter, il réapparut avec un masque en bois. Aucune des questions que je lui posai concernant la raison de sa disparition subite ou la provenance de ce masque, ne trouva la moindre réponse. Nous dînâmes en silence, tandis que je contemplais le masque que mon compagnon de voyage avait provisoirement posé sur la commode faisant face à la table, appuyé au mur. Il était sculpté avec finesse dans du bois d’ébène. Les traits –féminins- étaient d’une délicate beauté. Le nez était aquilin, les lèvres fines, les yeux en amande. Les pupilles de ces derniers étaient percés de trous, afin de