On tue
Mais pour toutes ces personnalités s'est imposée, corrélativement à l'engagement concret, la nécessité de témoigner par la parole, et plus particulièrement par la forme poétique. Par ce mode d'expression simple, direct, mais redoutable par sa puissance évocatrice, ils ont pleinement contribué à témoigner de l'horreur de la guerre, mais aussi à entretenir l'espoir et à créer cet esprit de corps qui était une réponse lumineuse à la barbarie nazie. C'est ainsi qu'il faut envisager le poème d'Arlette Humbert-Laroche « On tue » dont la construction ménage une forte opposition entre l'évocation des horreurs et l'appel à la résistance.
Aussi verrons-nous dans un premier temps qu'Arlette Humbert-Laroche s'emploie à présenter la guerre comme une logique de mort. Il nous faudra ensuite montrer que l'espoir habite la poétesse et qu'il s'agit pour elle de nous insuffler l'énergie de la révolte. Il apparaît d'emblée que la guerre est présentée comme une logique infernale. La mort est omniprésente, comme en témoigne l'anaphore « On tue » répétée six fois. Mais Arlette Humbert-Laroche suggère une violence aveugle, arbitraire. Tout d'abord l'anaphore place en sujet de la proposition le pronom indéfini « on » qui nie toute humanité et toute individualité : le « on » évoque un sujet dépersonnalisé et brut. De plus la proposition présente une structure simple – sujet-verbe – se réduisant à deux syllabes. On a là une volonté d'envisager la violence dans ce qu'elle recèle de plus primitif, de plus réducteur. La distribution enfin de l'anaphore (v.1, 3, 4, 11, 12, 13) précise un caractère imprévisible : la violence frappe aveuglément, et la combinaison de répétitions de la proposition « On tue » et de la dentale à l'initiale du