Peut-on désirer sans souffrir ?
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Quand l’enfant écrit sa lettre au Père Noël, il lui fait la demande de réaliser ses désirs, en l’occurrence lui offrir les jouets désirés. Il se projette dans la situation souhaitée et se dit intérieurement : “qu’est-ce que je serais heureux si j’avais…”. En attendant que celle-ci se réalise, il ressent un manque, il est malheureux car il souffre de ce manque. En effet, il semble exister un paradoxe inhérent au désir. Le désir peut être compris comme le mouvement de mon existence, et en ce sens être l’affirmation de mon être propre. Cependant, il semble aussi avoir pour fonction de barrer l’accès à la jouissance puisqu’on ne désir que ce qu’on ne possède pas. En effet, la notion désirer provient du latin “desiderare”, c’est-à-dire “regretter l’absence de”. On souhaite quelque chose qui n’est pas. On est alors assujetti à une torture, aux tumultes de notre âme entêtée. La question vient alors de savoir si l’on peut désirer sans nécessairement souffrir. L’enjeu de cette question est le bonheur, car il nous semble toujours que nous serions plus heureux si nous pouvions moins souffrir. Une vie sans désir est-elle alors une vie heureuse ?
En quoi désirer est-ce chercher à combler un manque, qui implique alors une souffrance pour le sujet désirant ? La nature du désir ne réside-t-elle pas dans une tension qui fait plaisir, le plaisir s’opposant à la souffrance ? Enfin, n’y a-t-il pas derrière la notion de désir celle de la volonté qui nous pousse à agir pour donner un sens à notre existence et ainsi s’arracher à la souffrance ?
“Le désir est manque”. Telle est la pensée de Platon. Tout d’abord, nous désirons ce que nous ne possédons pas, donc ce qui nous manque. Nous souffrons alors de ne pas avoir ce que nous voulons, nous ressentons des frustrations et nous accusons les autres d’être les auteurs de ces frustrations. Cette situation est vécue comme une souffrance si le sujet désirant se place dans une attitude de passivité qui inverse la vraie signification du