Peut-on reprocher à une oeuvre d'art de ne rien vouloir dire ?
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La raison d'être d'une œuvre d'art ne semble pouvoir être définie sans donner lieu à toutes sortes de controverses, voire de malentendus — comme l'atteste, dans la critique d'art, la diversité des appréciations portées sur une même œuvre. En fait, tout jugement porté sur une œuvre engage une certaine conception des critères distinctifs de l'activité artistique, et partant, du statut de l'art. Les partisans de « l'art pour l'art » et ceux de « l'art engagé » développèrent en leur temps des polémiques mémorables. Les philosophes eux-mêmes, partant de problématiques différentes, n'évaluent pas de la même manière la portée du phénomène artistique : Platon se méfiait des poètes en qui il voyait des illusionnistes peu soucieux de vérité, tandis qu'Aristote vantait le côté « thérapeutique » de l'art tragique qui permet une sorte d'extériorisation des passions (« catharsis »). La question de la fonction de l'art, et notamment du rapport entre l'art et le langage, a connu au XXe siècle un renouvellement décisif, avec l'Art abstrait. Émancipée des exigences de la représentation figurative ou du sens explicite, la peinture abstraite provoquait souvent l'indignation ou la moquerie : « cela ne ressemble à rien » ; « cela ne veut rien dire », etc. L'explicitation des présupposés de tels propos fournit à la réflexion l'occasion d'analyser le problème des critères distinctifs de l'œuvre d'art, de sa raison d'être. Peut-on reprocher à une œuvre d'art de « ne rien vouloir dire »