La philosophie et la mort
La mort s’oppose à l’existence, mais c’est le temps qui les réunit. En effet, hormis Dieu peut-être, exister n’a de sens que dans le temps ; quant à la mort, elle représente, pour l’homme, la preuve la plus incontournable de sa nature temporelle et terrestre : la mort est ainsi l’épreuve même et ultime du temps. C’est cela qu’on appelle la “finitude” humaine.
Dans son livre La mort, V. Jankélévitch organise son approche de la question selon les trois temps successifs : avant la mort, pendant la mort, après la mort. Or, si l’on tente de reconstituer la réflexion philosophique à ce propos, l’on s’aperçoit que celle-ci ne s’est longtemps intéressée qu’au troisième temps : la mort après la mort ; soit son aspect le plus métaphysique, l’Idée de la mort : l’incompréhensible. Mais il n’y a alors aucune différence entre l’idée de la mort et celle du Néant, lequel est bien, comme tel, quelque chose d’incompréhensible. — La pensée de la mort avant la mort précède également celle de la mort “en face”, si l’on peut dire, car elle est à nouveau une façon de différer son approche la plus radicale : il s’agit souvent, d’ailleurs, de la mort des autres : l’inadmissible. — Enfin vient la mort pendant la mort, seule véritable mort, la mort propre, à même l’existence : l’impossible. En effet il s’agirait de soutenir l’impossible même : vivre sa mort. Cependant n’est-ce pas le cas dans certaine situations que l’on qualifie justement de “mortelles”, d’impossibles à vivre, etc. ? La mort n’a de sens que si elle est pensée avec l’existence, ce qui veut dire encore qu’elle n’a de sens que pour un sujet vivant dans le temps.
I - L’Idée métaphysique de la Mort
1) Les thèses spiritualiste et panthéiste
Les thèses spiritualiste et panthéiste sont complémentaires. Toutes deux font de la mort un principe métaphysique, c’est-à-dire une essence précédant et dominant l’existence humaine : principe de séparation pour la première, principe de réunion pour la