Poemes bac
Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends.
J'irai par la forêt, j'irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.
Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.
Victor Hugo – Les Contemplations. 1856 La Lune
Jeanne songeait, sur l'herbe assise, grave et rose;
Je m'approchai:—Dis-moi si tu veux quelque chose,
Jeanne ?—car j'obéis à ces charmants amours,
Je les guette, et je cherche à comprendre toujours
Tout ce qui peut passer par ces divines têtes.
Jeanne m'a répondu:—Je voudrais voir des bêtes.
Alors je lui montrai dans l'herbe une fourmi.
—Vois! Mais Jeanne ne fut contente qu'à demi.
—Non, les bêtes, c'est gros, me dit-elle.
Leur rêve,
C'est le grand. L'Océan les attire à sa grève,
Les berçant de son chant rauque, et les captivant
Par l'ombre, et par la fuite effrayante du vent;
Ils aiment l'épouvante, il leur faut le prodige.
—Je n'ai pas d'éléphant sous la main, répondis-je.
Veux-tu quelque autre chose ? ô Jeanne, on te le doit !
Parle.—Alors Jeanne au ciel leva son petit doigt.
—Ça, dit-elle.—C'était l'heure où le soir commence.
Je vis à l'horizon surgir la lune immense.
Victor Hugo - L'Art d'être grand-père. 1877
A une femme
A vous ces vers, de par la grâce consolante
De vos grands yeux où rit et pleure un rêve doux,
De par votre âme pure et toute bonne, à vous
Ces vers du fond de ma détresse violente.
C'est qu'hélas le hideux cauchemar qui me hante
N'a pas de trêve et va furieux, fou, jaloux,
Se multipliant