Poème du romantisme
LE SOIR
Le soir ramène le silence.Assis sur ces rochers déserts,Je suis, dans le vague des airs,Le char de la nuit qui s’avance.5Vénus se lève à l’horizon ;À mes pieds l’étoile amoureuseDe sa lueur mystérieuseBlanchit les tapis de gazon.De ce hêtre au feuillage sombre10J’entends frissonner les rameaux :On dirait autour des tombeauxQu’on entend voltiger une ombre.Tout-à-coup, détaché des cieux,Un rayon de l’astre nocturne,15Glissant sur mon front taciturne,Vient mollement toucher mes yeux.Doux reflet d’un globe de flamme,Charmant rayon, que me veux-tu ?Viens-tu dans mon sein abattu20Porter la lumière à mon âme ?Descends-tu pour me révélerDes mondes le divin mystère,Ces secrets cachés dans la sphèreOù le jour va te rappeler ?25Une secrète intelligenceT’adresse-t-elle aux malheureux ?Viens-tu, la nuit, briller sur euxComme un rayon de l’espérance ?Viens-tu dévoiler l’avenir30Au cœur fatigué qui t’implore ?Rayon divin, es-tu l’auroreDu jour qui ne doit pas finir ?Mon cœur à ta clarté s’enflamme,Je sens des transports inconnus,35Je songe à ceux qui ne sont plus :Douce lumière, es-tu leur âme ?Peut-être ces mânes heureuxGlissent ainsi sur le bocage :Enveloppé de leur image,40Je crois me sentir plus près d’eux !Ah ! si c’est vous, ombres chéries !Loin de la foule et loin du bruit,Revenez ainsi chaque nuitVous mêler à mes rêveries.45Ramenez