Poèmes oniriques pour des recueils de poesie à faire pour l'ecole
J'ai vu passer dans mon rêve- Tel l'ouragan sur la grève, -D'une main tenant un glaiveEt de l'autre un sablier, Ce cavalierDes ballades d'Allemagne Qu'à travers ville et campagne, Et du fleuve à la montagne, Et des forêts au vallon, Un étalonRouge-flamme et noir d'ébène, Sans bride, ni mors, ni rêne, Ni hop ! ni cravache, entraîne Parmi des râlements sourds Toujours ! toujours !Un grand feutre à longue plumeOmbrait son œil qui s'allume Et s'éteint. Tel, dans la brume,Éclate et meurt l'éclair bleu D'une arme à feu.Comme l'aile d'une orfraieQu'un subit orage effraie,Par l'air que la neige raie,Son manteau se soulevantClaquait au vent,
Et montrait d'un air de gloire Un torse d'ombre et d'ivoire, Tandis que dans la nuit noire Luisaient en des cris stridents
Trente-deux dents.
Paul VERLAINE, Poèmes saturniens, 1866
«...Et de l'autre un sablier...» Rêves
J'ai rêvé parfois que vos yeux Me regardaient avec tristesse, Que vos grands yeux bleus sérieux Me regardaient avec tendresse ;J'ai rêvé que vous écoutiez Ces mots sur qui la voix hésite, Et qui s'arrêtent effrayés De l'aveu qui sous eux palpite ;Que, dans mes mains, vos fines mains Tombaient comme deux fleurs fauchées, Et que nos pas, dans les chemins, Laissaient leurs traces rapprochées.Mais je n'ai pas osé rêver, Dans les ivresses ni les fièvres, Que ce bonheur pût m'arriver Que ma bouche effleurât vos lèvres.J'ai rêvé parfois que vos yeux Me regardaient avec tendresse, Que vos grands yeux bleus sérieux Me regardaient avec tristesse
Auguste ANGELLIER, Le chemin des saisons, 1903 Le rêve d'un curieux
Connais-tu, comme moi, la douleur savoureuse, Et de toi fais-tu dire : " Oh ! l'homme singulier ! " - J'allais mourir. C'était dans mon âme amoureuse, Désir mêlé d'horreur, un mal particulier ;Angoisse et vif espoir, sans humeur factieuse. Plus allait se vidant le fatal sablier, Plus ma torture était âpre et délicieuse ; Tout mon cœur s'arrachait au monde familier.J'étais comme