Poésie moderne
Sujet traité : composez un corpus réunissant 3 ou 4 poèmes de votre choix qui illustrent à vos yeux la notion de modernité en poésie.
Extrait des Petits Poèmes en prose de Charles Baudelaire
« Le Port ».
Un port est un séjour charmant pour une âme fatiguée des luttes de la vie. L'ampleur du ciel, l'architecture mobile des nuages, les colorations changeantes de la mer, le scintillement des phares, sont un prisme merveilleusement propre à amuser les yeux sans jamais les lasser. Les formes élancées des navires, au gréement compliqué, auxquels la houle imprime des oscillations harmonieuses, servent à entretenir dans l'âme le goût du rythme et de la beauté. Et puis, surtout, il y a une sorte de plaisir mystérieux et aristocratique pour celui qui n'a plus ni curiosité ni ambition, à contempler, couché dans le belvédère ou accoudé sur le môle, tous ces mouvements de ceux qui partent et de ceux qui reviennent, de ceux qui ont encore la force de vouloir, le désir de voyager ou de s'enrichir.
Verlaine (« Sonnet boiteux » , recueil : Jadis et Naguère) 1881.
Ah ! vraiment c'est triste, ah ! vraiment ça finit trop mal,Il n'est pas permis d'être à ce point infortuné.Ah ! vraiment c'est trop la mort du naïf animalQui voit tout son sang couler sous son regard fané.Londres fume et crie. O quelle ville de la Bible !Le gaz flambe et nage et les enseignes sont vermeilles.Et les maisons dans leur ratatinement terribleEpouvantent comme un sénat de petites vieilles.Tout l'affreux passé saute, piaule, miaule et glapitDans le brouillard rose et jaune et sale des SohosAvec des "indeeds" et des "all rights" et des "haôs".Non vraiment c'est trop un martyre sans espérance,Non vraiment cela finit trop mal, vraiment c'est tristeO le feu du ciel sur cette ville de la Bible !
Rimbaud (« Nocturne vulgaire» , recueil : les illuminations.) 1873-1875.
Un souffle ouvre des brèches opéradiques dans les cloisons, — brouille le pivotement des toits rongés, —