Poésies
Vous produisez des feux qui me vont dévorant :
Beaux yeux, mais ! beaux soleils qui m'allez éclairant,
Vous brûlez, et le ciel me force de vous suivre.
Beaux yeux, dont la clarté du trépas me délivre,
Et du chemin d'erreur où j'allais m'égarant ;
Qui vous voit sans mourir n'est pas digne de vivre,
Et qui vit sans vous voir, d'un mort n'est différent.
Je n'avais point vécu jusqu'à l'heure première
Qu'amour me découvrit votre belle lumière,
Et que de vos regards je fus illuminé :
Mais ce même moment qui me donne naissance,
Du don qu'il m'avait fait m'ôta la jouissance,
Car je fus à vos rais aussitôt mort que né. Roses ardentes Roses ardentes
Dans l'immobile nuit,
C'est en vous que je chante,
Et que je suis.
En vous, étincelles,
A la cime des bois,
Que je suis éternelle,
Et que je vois.
Ô mer profonde,
C'est en toi que mon sang
Renaît vague blonde,
En flot dansant.
Et c'est en toi, force suprême,
Soleil radieux,
Que mon âme elle-même
Atteint son dieu ! {text:soft-page-break} Le Corbeau et le Renard Maître Corbeau, sur un arbre perché,
Tenait en son bec un fromage.
Maître Renard, par l'odeur alléché,
Lui tint à peu près ce langage :
"Hé ! bonjour, Monsieur du Corbeau.
Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau !
Sans mentir, si votre ramage
Se rapporte à votre plumage,
Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois. "
A ces mots le Corbeau ne se sent pas de joie ;
Et pour montrer sa belle voix,
Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie.
Le Renard s'en saisit, et dit : "Mon bon Monsieur,
Apprenez que tout flatteur
Vit aux dépens de celui qui l'écoute :
Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute. "
Le Corbeau, honteux et confus,
Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus. La Cigale et la Fourmi La Cigale, ayant chanté
Tout l'été,
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue :