Precarité
«La différence, la folie, l’enfermement sont des thèmes si fragiles et délicats... Je voulais montrer des êtres humains souvent abandonnés, qui perdent pied, que la détérioration mentale coupe du monde, enferme dans une infinie solitude mais qui ont encore quelque chose à offrir, à partager, ne serait-ce que dans leurs regards. Ils ont aussi tant besoin de recevoir»François Emmanuel, écrivain.
1983..Chaque jour, avec la .même émotion, je franchissais le portail, de l'hôpital de la fraternité de Roubaix., je retrouvais les allées d'arbres, l’alignement des pavillons. Le grincement des grilles, le bruit des cadenas que l’on referme signifiait que j'étais arrivé au pavillon psychiatrique, premier service de ma carrière hospitalière.
Dans ce pavillon isolé se dégageait cette odeur si particulière de sueur, d’angoisse, de chlore et de tabac. Les couleurs vertes et jaunes pales des murs, des couvertures usées sur les lits et surtout les malades aux yeux fixes, parfois presque transparents, noyés dans ce monde inaccessible appelé «psychiatrie » Paradoxalement, l’ensemble de l'équipe médical et paramédical étaient souriantes, ouvertes et disponible. Les fous rires de mes collègues traversaient ce couloir glacial, Jour après jour, j’essayais d’aller à la rencontre des malades. Je voyais des larmes, j’entendais des cris, des grincements de dents, je m’asseyais à coté de certains patients qui n'étaient que des ombres, mon travail de soignante était devenu impossible à réaliser. La peur et l'anxiété était omniprésente dans chaque tache que j'effectué. Je ne quittais pas l'infirmière d'un pas.........J'étais terrorisée face à ce monde.......où l'âme a mal.
Après quelques mois, mon angoisse disparue peu à peu, je portais un regard différent sur les malades psychiatriques, un regard tendre. Mes compétences me permettaient de prendre en charge des patients grâce aux infirmières qui ont su me montrer que les gens qui vivent dans la différence