Préface
Car l'Empereur est saoul de ses vingt ans d'orgie! Il s'était dit : «Je vais souffler la liberté Bien délicatement, ainsi qu'une bougie!»
La Liberté revit! Il se sent éreinté!
Il est pris. - Oh! quel nom sur ses lèvres muettes Tressaille ? Quel regret implacable le mord ? On ne le saura pas. L'Empereur a l'œil mort.
Il repense peut-être au Compère en lunettes... - Et regarde filer de son cigare en feu, Comme aux soirs de Saint-Cloud, un fin nuage bleu.
La bataille de Sarrebrûck, dans cet imaginaire, était la démonstration par excellence des mérites de l’armée: bien entraînée, bien équipée. En fait, la gravure est représentative de cet état d’esprit: les soldats sont conquérants (les fantassins et cavaliers vont vers l’est) et les couleurs chatoyantes.
« La disposition des troupes est harmonieuse et simple, conviant le spectateur à imaginer la bonne organisation dont cet ordre témoigne. Faire la guerre serait en effet aussi simple que participer à une revue militaire. Les défilés et revues militaires encourageaient les naïfs à se porter volontaires. »
Dans le texte de Rimbaud, on est loin de tout ça. Tout d’abord, parce qu’il n’y a pas de bataille et que l’Empereur est loin de faire l’unanimité ! Il faut dire que la campagne de 1870 avait connu des scènes de désordre, comme celle que raconte Henri Guillemin:
« un loustic criait sur un ton suraigu : « Vive l’Empereur ! » Et le détachement entier, avec ensemble, comptait : « Une ! deux ! trois ! » et répondait « M… ! » Les officiers n’osaient rien dire ».
C’est précisément ce « Vive l’Empereur » qui aurait inspiré Rimbaud, du moins, selon Ascione et Chambon, le double sens de l’expression. Car, en argot du XIXe sicèle, « crier Vive l’Empereur » est synonyme de « se masturber