La tension entre la raison et le sentiment dans la littérature entre le

XVIIIème et le XXème siècle marqua les plus beaux ouvrages de ces siècles. Le chemin

parcouru de l'un à l'autre, certaines oeuvres alliant parfois les deux approches, amenèrent

les auteurs de ces époques à créer une véritable écriture, particulière à chacun des deux

partis. L'écriture de la raison très visible au XVIIIème siècle, parfois à visée argumentative, avec l'esprit des Lumières et leur volonté d'éclairer les lecteurs, alliée à la sensibilité de

l'écriture du XIXème siècle, propose une véritable problématique sur la production littéraire entre le XVIIIème et le Xxème siècle. Comment passe-t-on de l'un à l'autre ? Comment

deux approches, pourtant opposées, peuvent-elles se rejoindre au fil des oeuvres, et

éclairer leur théorisation ?

Nous tenterons de répondre à ces questions en déroulant le fil de ces approches, en

observant tout d'abord l'écriture des Lumières du XVIIIème, paroxysme de la raison en

littérature, puis nous étudierons un auteur charnière, Jean-Jacques Rousseau, qui, en

plein “élan raisonné” proposa les premiers “écrits sensibles” et engendra le pré-

romantisme. En second lieu nous nous intéresserons au romantisme du XIXème siècle,

qui marque l'apogée de la sensibilité dans l'écriture. Enfin nous tirerons le bilan de ces

analyses en essayant de joindre la raison au sentiment, en étudiant des oeuvres qui ont

allié les deux approches.

Le XVIIIème siècle est marqué par la volonté des auteurs de poser les

problèmes de leur époque et d'en informer leurs lecteurs. La société va mal, le système

monarchique en place est étouffant, et ces écrivains du XVIIIème veulent mettre les

lecteurs en face de leur réalité. Eclairer, c'est la devise des Lumières, mouvement majeur

de ce siècle. Ici, la raison est essentielle. Il ne s'agit pas de s'éloigner vers des songes

lointains, d'écarter le lecteur de sa